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Acheter une maison sans garantie légale: ce qu’il faut savoir

Vous pensez avoir trouvé le chalet ou la maison idéal, mais en parcourant la fiche descriptive de l’annonce, vous lisez la mention «vente sans garantie légale, aux risques et périls de l’acheteur». Qu’est-ce que cela signifie?

Au Québec, le Code civil prévoit que la vente d’un immeuble est faite avec la garantie légale, sauf énoncé contraire. Or de plus en plus de propriétés sont vendues «sans garantie légale», avec des clauses comme «aux risques et périls de l’acheteur» ou «acheté tel que vu». Non seulement ces énoncés proviennent-ils souvent des vendeurs, mais un nombre croissant d’acheteurs proposent d’acheter sans garantie légale de qualité afin de se démarquer d’autres acheteurs potentiels.

La garantie légale, c’est quoi ?

La garantie légale est constituée de deux éléments: la garantie de qualité et la garantie du droit de propriété.

• La garantie de qualité lie les deux parties du contrat de vente. Elle couvre l’acheteur contre tout vice caché qui pourrait être décelé dans la propriété. Elle est d’ailleurs souvent appelée «garantie contre les vices cachés». Elle s’applique au chalet, mais aussi à tout ce qui y est rattaché, par exemple une cheminée, une galerie, un garage ou une piscine.

• La garantie du droit de propriété concerne les vices de titre qui pourraient priver l’acheteur de son droit de propriété ou restreindre ce dernier. Il existe plusieurs types de vices de titre: les empiétements, les servitudes, la non-conformité au zonage, etc. Certains de ces risques peuvent ne pas être couverts par l’attestation d’un notaire, comme un empiétement révélé par un nouvel arpentage (par exemple, le quai du chalet voisin déborde sur votre propriété) ou une fraude (par exemple, un vol d’identité).

Son champ d’application

La garantie légale est obligatoire et existe par le seul effet de la loi: elle s’applique, même si l’offre d’achat ou l’acte de vente ne contient aucune clause à son sujet.

L’exclusion de la garantie du droit de propriété n’est jamais conseillée, sauf exception. En revanche, les parties conviennent de plus en plus fréquemment de réduire la portée de la garantie de qualité (par exemple en la levant sur la piscine) ou même de l’exclure complètement.

Cela doit être mentionné dès la mise en marché, et clairement indiqué dans la déclaration du vendeur, l’offre d’achat et l’acte de vente. C’est souvent le cas dans les ventes de succession, ou encore quand les vendeurs sont des personnes âgées qui veulent avoir une certaine tranquillité d’esprit.

Si vous achetez une propriété vendue à la suite d’un jugement ou d’une ordonnance du tribunal, vous ne pourrez pas bénéficier de la garantie contre les vices cachés. Les immeubles repris par les institutions financières sont toujours vendus sans garantie légale, car ces dernières ne veulent pas courir le risque de se faire poursuivre pour vice caché.

Cependant, un vendeur professionnel (comme le constructeur, le promoteur de maisons neuves ou toute personne tirant ses revenus d’activités de vente d’immeubles sur une base régulière) ne peut ni exclure ni limiter les garanties légales. Précisons que, dans la jurisprudence, le courtier immobilier n’est pas considéré comme un vendeur professionnel quand il agit comme intermédiaire entre le vendeur et l’acheteur: il peut donc exclure ou diminuer la garantie légale. Toutefois, il a le devoir de bien informer les deux parties des conséquences de leurs choix.

Les recours de l’acheteur

La garantie contre les vices cachés vous protège et vous permet d’intenter un recours contre le vendeur dans les trois années suivant la découverte d’un vice caché. Toutefois, vous devez envoyer une mise en demeure au vendeur, pour l’informer de la situation et lui demander réparation, dans un délai de trois à six mois. Il s’agit d’une action personnelle.

Selon la situation, vous pourriez obtenir:

• le remboursement partiel du prix de vente (diminution de prix) – c’est le recours le plus souvent utilisé ; il vous faudra prouver que, si vous aviez eu connaissance du vice, vous auriez payé un prix moindre;

• le remboursement des rénovations nécessaires pour réparer le vice;

• la résolution de la vente – rarement prononcée, elle consiste à annuler la transaction; elle s’applique si vous arrivez à démontrer que vous n’auriez pas acheté la propriété si vous aviez eu connaissance du vice;

• le remboursement pour dommages et intérêts, en plus de la diminution du prix, du remboursement des rénovations ou de la résolution de la vente – ne peut être appliqué que s’il est démontré que le vendeur connaissait le vice caché mais ne l’a pas révélé.

Acheter sans garantie légale

Une vente « sans garantie légale » signifie que vous achetez le chalet dans l’état où il se trouve, avec ses défauts : en cas de vice caché, vous n’aurez aucun recours contre le vendeur. «Lorsqu’il n’y a plus de garantie légale, tout problème survenant avec la propriété ne peut donner lieu à aucun recours contre le vendeur, sauf conditions particulières», explique Me Timothée Vallée, notaire associé chez VSB Notaires.

Cette mention n’exonère pas le vendeur de sa responsabilité s’il connaissait le vice caché et ne vous l’a pas révélé. «Dans tous les cas, le vendeur a l’obligation de remplir la déclaration du vendeur, dans laquelle il divulgue tous les facteurs défavorables à la transaction», souligne Me Caroline Champagne, vice-présidente, Encadrement, à l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ). «Si des informations n’avaient pas été divulguées dans cette déclaration, l’acheteur pourrait avoir un recours contre le vendeur» Des propos mensongers ou un silence sur des informations essentielles constituent une manœuvre dolosive: selon les circonstances, vous pourriez obtenir une annulation de la vente ou une diminution du prix, éventuellement assortie de dommages-intérêts.

«Auparavant, lors d’une vente sans garantie légale, le prix demandé était beaucoup plus bas : il y avait un jeu de négociation entre le vendeur et l’acheteur, souligne Me Timothée Vallée. Mais actuellement, le prix des maisons a beaucoup augmenté, et elles sont vendues sans garantie légale par des propriétaires en position de force [en raison de la forte demande (NDLR)].»

«C’est le vendeur qui décide de vendre sans garantie légale, mais c’est l’acheteur qui accepte de prendre le risque d’acheter sans elle, résume Me Caroline Champagne. Il est donc d’autant plus important de faire faire une inspection préachat dans un contexte comme celui-là!»

À retenir

En principe, le courtier immobilier n’est pas lié à la garantie légale de qualité. S’il a agi avec prudence et diligence, vous ne pouvez pas lui reprocher de ne pas avoir repéré un vice caché. En revanche, dans le cas où il vous aurait volontairement trompé par son silence ou de fausses représentations, vous pourriez faire une réclamation au comité d’indemnisation de l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ) pour fraude et manœuvre dolosive.

Qu’est-ce qu’un vice caché?

Pour être qualifié de «vice caché», un défaut doit répondre aux quatre critères suivants.

• Le vice doit être majeur, d’une gravité telle que, si vous en aviez eu connaissance, vous n’auriez pas acheté la propriété ou vous en auriez négocié le prix à la baisse. Il doit vous empêcher de faire usage de votre chalet comme prévu.

• Le vice doit être caché, c’est-à-dire qu’un acheteur prudent et diligent n’aurait pas pu le déceler lors d’un examen visuel courant. Attention: en cas d’indices d’un défaut lors de l’achat, vous devez vous faire aider par un expert pour l’inspection, sinon le vice pourra être déclaré apparent.

• Le vice doit être inconnu de l’acheteur : si le vice est visible, ou que le vendeur vous en a informé, il sera qualifié de vice apparent. En cas de litige, le vendeur cherchera à prouver que vous aviez connaissance du vice.

• Le vice doit être existant lors de la vente. Il faut que le vice, ou du moins sa cause, ait pris naissance quand le vendeur était propriétaire. En tant qu’acheteur, c’est à vous de le démontrer.

Un problème de fissure affectant la solidité de la fondation ou l’absence de pare-vapeur ayant entraîné des infiltrations d’eau dans un mur pourraient constituer des exemples de vices cachés.

À noter que le vendeur est responsable du vice caché même s’il ignorait son existence au moment de la vente.

Source : Protégez Vous

Crédit photo: Numéra